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"Si j'avais su l'année dernière ce qu'était cette fonction de président de l'Union Africaine, j'aurais refusé. [...] Cette position n'a pas beaucoup de sens à l'heure actuelle". Les paroles de Mouammar Kadhafi, en guise de clôture de son mandat d'un an à la tête de l'institution africaine, ont dû en faire sourire plus d'un. Pourtant, il y a un an, à Addis-Abeba, capitale de l'Ethiopie et siège de l'UA, le leader de la révolution libyenne avait réussi à jeter un froid en se faisant élire à la présidence, car seul représentant de l'Afrique du nord, région à laquelle devait revenir le poste selon le système de rotation mis en place. "Je vais vous provoquer, avait-il alors déclaré, mais c'est pour le bien de l'Afrique".

L'Union Africaine, en 2009, a dû déjà faire face à une crise largement exogène : celle de la finance mondiale. Là où le continent africain affichait un taux de croissance annuelle de 6%, il n'a dû se contenter que d'un petit 1,7% cette année. Dans le contexte actuel, un pareil taux ferait l'affaire de nombreux pays occidentaux, sauf qu'à la vue de la fragilité de l'économie africaine, et des conflits locaux qui la perturbent continuellement, cela n'augure rien de bon pour le quotidien des populations pour l'année à venir.

Dans le domaine où elle a le plus d'impact, la sécurité sur le continent, l'UA peut se satisfaire d'une baisse relative de la conflictualité sur le terrain. Comme le note Philippe Hugon, directeur de recherche à l'Institut des Relations Internationales et Stratégiques (IRIS), celle-ci s'est déplacée d'Ouest en Est : "En 2009, le spectre des conflits a continué de hanter la RDC (Nord Kivu), la Somalie, l’Érythrée ainsi que l’Éthiopie et le Soudan avec le Sud et le Darfour, principal foyer de crise. La région la plus conflictuelle demeure la Corne de l’Afrique". Le phénomène inquiétant est la résurgence des coups d'Etats, qui ont émaillé l'année écoulée et la persistance de crises politiques qui entrava le bonne marche des états (Madagascar). De façon générale, les élections qui se sont déroulées sur le continent africain ont confirmé l'emprise de partis, de clans ou de leaders déjà en place : élection d'Ali Bongo au Gabon, victoire prévisible du Parti Démocratique Bostwanais au Bostwana (second mandat pour le président Khama), réelection de Teodoro Obiang Nguema en Guinée-équatoriale (à la tête du pays depuis 1979), etc.

C'est peut-être du côté des institutions que l'Union Africaine a fait un grand pas cette année. Avec la création de l'Autorité de l'Union, c'est le fédéralisme africain qui se renforce : la nouvelle entité, qui remplacera la Commission, coordonnera la défense et les relations internationales. Un sacrifice d'une partie de la souveraineté de chaque Etat, qu'il a fallu âprement négocier au cours de l'année (l'Afrique du Sud et l'Ethiopie ayant été les plus réticentes). Le dossier tenait visiblement à coeur au colonel Kadhafi, qui est intervenu de tout son poids (ce qui n'a pas tout le temps plaidé en la faveur du projet). "En règle générale, les présidents en exercice interviennent assez peu. C’est normal. Contrairement à moi, ils ont d’autres chats à fouetter, un pays à diriger. Mouammar Kaddafi, lui, intervient beaucoup. C’est évidemment plus compliqué à gérer…" expliquait ainsi Jean Ping, le président de la Commission à Jeune Afrique, il y a une semaine.

Enfin si l'on regarde du côté de la diplomatie, deux faits sont à prendre en compte. Tout d'abord, l'arrivée de Barack Obama au pouvoir aux Etats-Unis. On avait rêvé, au soir du 4 novembre 2008, à une nouvelle relation entre l'Amérique et l'Afrique. En fait, l'action d'Obama s'inscrit dans la continuité de celle de son prédécesseur, qui s'était impliqué de façon notable dans la lutte contre le SIDA, le paludisme et pour une amélioration des conditions d'éducation. La nouvelle administration, en s'appuyant sur ces points, fera aussi de l'Afrique un acteur stratégique de la lutte contre le terrorisme (Somalie). L'autre point à souligner est l'implication grandissante de la Chine dans l'économie africaine, par le biais de divers programmes : 700000$ donnés à l'UA pour ses actions de paix en Somalie, construction d'hôpitaux et d'écoles au Bénin, au Ghana, au Nigéria, au Cameroun, et au Libéria, 7.2 millions de dollars pour le développement du Burundi, etc...

La page Kadhafi se tourne avec l'Union Africaine. C'est le Malawi et son président, Bingu Wa Mutharika qui prend donc le relais. 2010 sera pour l'Afrique l'occasion de revenir sur son passé de continent colonisé : 17 pays fêteront le cinquantenaire de leur indépendance. Ce sera l'heure du bilan. L'UA se penchera sur le cas des élections présidentielles ivoiriennes, reportées. La question du maintien de la paix en Somalie et au Soudan devra être, comme chaque année, réévaluée, les forces de l'Union n'ayant pas réussi à ramener un semblant de stabilité. 2010, sera enfin l'année du sport africain, avec l'organisation de la Coupe du monde de football.
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